Surdité et déclin cognitif : un lien à ne pas négliger
La perte auditive, bien plus qu’une simple altération sensorielle, est désormais identifiée comme un facteur de risque majeur de déclin cognitif. Le congrès Fragilité du sujet âgé 2024 a souligné l’urgence de mieux prendre en charge cette problématique.
La surdité, un facteur de risque modifiable pour le déclin cognitif
La perte auditive est l’un des facteurs modifiables les plus déterminants dans le risque de déclin cognitif et de démence. Les études montrent que ce risque augmente de manière significative dès une perte auditive légère, à partir de 25 décibels. Le Pr Bernard Fraysse, expert en ORL, a rappelé lors du congrès Fragilité du sujet âgé 2024 que le risque de déclin cognitif est multiplié par 2 en cas de surdité légère, par 3 pour une surdité moyenne, et par 5 pour une surdité sévère.
Des mécanismes complexes à l’origine de ce lien
Le lien entre surdité et déclin cognitif est multifactoriel. D’une part, le cerveau compense les "trous" dans le signal sonore en sollicitant davantage la mémoire de travail, ce qui entraîne une surcharge cognitive. À long terme, cette surcharge peut épuiser le cortex. D’autre part, un manque de stimulation du cortex auditif peut provoquer son atrophie. Enfin, l’isolement social et les troubles de l’humeur liés aux difficultés de communication accentuent encore le risque de déclin cognitif.
L’impact des aides auditives sur la cognition
Le port précoce d’une prothèse auditive ou d’un implant cochléaire peut réduire significativement le risque de déclin cognitif. Des études récentes ont démontré qu’un appareillage adapté permet de diminuer ce risque de 20 %, et jusqu’à 48 % chez les personnes présentant des facteurs de risque cardiovasculaires. Cependant, malgré ces bénéfices prouvés, seules 17 % des personnes concernées en France sont équipées, ce qui souligne une prise en charge encore largement insuffisante.
Un dépistage précoce essentiel pour prévenir la démence
Pour optimiser l’efficacité des aides auditives, il est crucial d’intervenir tôt. Le Pr Fraysse prône un dépistage systématique tout au long de la vie, comme cela se fait déjà pour les nouveau-nés. Il propose des bilans auditifs lors des examens de prévention à 45-50 ans, à la préretraite, ou encore dans le cadre du programme ICOPE, dédié à la prévention des fragilités chez les seniors.
Le rôle central des médecins généralistes
Face à une plainte auditive, les médecins généralistes et gériatres doivent poser un diagnostic précis, incluant une vérification des tympans, un audiogramme et une évaluation de l’équilibre. En cas de perte auditive symétrique et sans signe associé, la prescription d’une prothèse auditive peut être réalisée rapidement. Sinon, une orientation vers un ORL est nécessaire. Une prise en charge globale, intégrant un suivi orthophonique et une réhabilitation auditivo-cognitive, est parfois requise.
La perte auditive, trop souvent négligée, est un facteur de risque crucial dans la prévention du déclin cognitif. Un dépistage précoce et une meilleure prise en charge des troubles auditifs sont essentiels pour préserver la santé mentale et sociale des personnes âgées.
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