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Compte-rendu de la Table ronde du 17 novembre 2004 du GEH

L’accessibilité des PMR aux centres urbains et aux lieux ouverts au public

« Le stationnement pour handicapés … Une porte ouverte sur la vie »

Lieu : Le Centre Neurologique William Lennox, 6 Allée de Clerlande - 1340 Ottignies La salle Broos du CNWL était presque trop exiguë pour accueillir les nombreux participants – conférenciers et auditeurs – à cette « Table ronde » mise sur pied par Thierry Carière, président du GEH, et son équipe.
Ordre du jour :
1- La législation et son application
2- Exemples locaux d'initiatives et de réalisations citoyennes
3- Le rôle et le soutien des forces de Police
4- Le rôle des associations des PMR dans la démystification de leur problématique auprès du public
5- L'attitude de la justice dans la suite donnée à la verbalisation, à la lumière de notre « récolte » auprès du Parquet
6- Initiative de Plain Pied : (bureau d’études en accessibilité),
7- Le rôle des Médias
8- La place du Centre Egalité des Chances
9- Rôle d’un médiateur urbain

Dans son introduction, Thierry Carière cita et remercia les associations qui avaient collaboré à l’organisation de cette journée : représentants du pouvoir politique, échevinats ayant les problèmes des PMR dans leurs compétences, représentants de polices locales, GAMAH, Plain-Pied…. Pourquoi cette « Table ronde » ? L’accessibilité – au sens large, car elle ne se limite pas à l’accès aux places de parking – est réellement la toute 1ère et la plus importante porte qui peut et doit s’ouvrir sur la vie pour Les PMR. Car à l’ évidence, derrière cette porte qui s’ouvre, d’autres portes à leur tour vont s’ouvrir en cascade comme l’accès aux lieux de vie que sont : administrations, commerces, bâtiments, lieu de travail, cinémas, théâtres, salles de sport, etc . Lieux de vie pour l’accession desquels est attendue et réclamée une égalité de chance. Il s’agit donc d’un des problèmes qui préoccupent le plus les PMR, lesquels ne cessent de (se) poser des questions à ce sujet.

Certes, les lois et décrets (Circulaires ministériels, loi anti-discrimination, contrat d’avenir pour la Wallonie, etc..) existent, mais leur compréhension par les intéressés, ainsi que leur application par les responsables, laissent encore souvent à désirer.

Le président conclut son intervention en rappelant qu’une société civilisée se caractérise réellement par la prise en compte de ses éléments les plus faibles. Il passa ensuite la parole aux orateurs du jour.

1) Le Commissaire Alain ETIENNE, de Charleroi, entra dans le vif du sujet en abordant à l’aide de diapositives la question de « La législation et son application ». Le panneau portant les mots « Si vous prenez ma place, prenez aussi mon handicap », un message clair et explicite, donna à l’orateur l’occasion d’affirmer fortement qu’aucun conducteur valide ne peut invoquer l’ignorance. Il fit ensuite état d’une nouvelle disposition, entrée en cours le 1er janvier 2004, à savoir le « Code de la rue », dont l’objectif est d’assurer la sécurité des usagers « doux » (terme utilisé par le commissaire Etienne, à côté de « faibles », plus usité).
Ce code vise le partage équitable de la voie publique en incitant, entre autres dispositions :
a) les usagers « forts » à ralentir en présence d’usagers « faibles »,
b) les pouvoirs publics à créer des pistes cyclables hors agglomération et les deux-roues à les utiliser,
c) les automobilistes à ne pas envahir la bande côté habitations,
d) les automobilistes valides à ne pas stationner sur les emplacements réservés aux PMR, ce qui, rappelle le commissaire, constitue une infraction grave, passible d’une amende de 150 euros. « Pourquoi alors ne pas l’afficher sur les panneaux, comme en France ? », l’interrompit un auditeur.

Le commissaire ETIENNE rappela également l’obligation (selon la Loi) de prévoir 3 emplacements pour PMR sur 50 emplacements, assortis de normes (couleur et dimensions) bien précises et nettement signalés par le pictogramme bleu et blanc. Il conclut en affirmant que les Codes de la Route et de la Rue sont, avant tout, des règles de déontologie qui visent à assurer la convivialité entre tous les usagers.

2) Avant de passer la parole aux représentantes de la commune d’Etterbeek, Thierry Carière insista sur l’importance des initiatives prises par des institutions ou des particuliers pour promouvoir l’accessibilité.
C’est dans cet esprit que Mesdames DEWINNE (du service de l’animation d’Etterbeek) et GERARDI (médiatrice sociale) présentèrent l’état actuel des projets et réalisations de leur commune, comme par exemple :
a) l’élaboration d’un nouveau règlement en collaboration avec des associations de PMR,
b) une campagne de prévention par la distribution des affichettes bilingues « Je suis rouge de honte … / Ik schaam me vuurrood … » conçues par le GEH,
c) des chèques-Taxi, mis à la disposition des PMR pour obtenir une réduction du prix du taxi,
d) des aménagements de la voirie pour usagers « faibles », toujours en association avec des PMR,
e) des travaux d’aménagement de la bibliothèque,
f) des projets concernant l’aménagement des logements pour PMR, etc… A l’issue de cette présentation, T.C. fit état d’initiatives d’autres communes : Arlon, Forest, Verviers … ou d’hôpitaux, comme Mont-Godinne, St Luc à Bouge etc… Mais aussi de sociétés privées comme la FEDIS (grands magasins) ou Interparking (Parkings souterrains) ….

3) Au chapitre « rôle des forces de l’ordre », les questions posées préalablement par le GEH à quelques zones de police (Mons, Nivelles, Andenne, Charleroi, Ottignies, Wavre…) apprirent que toutes appliquaient la « tolérance zéro » à l’égard des contrevenants (amende de 150.00€).
De même que la gratuité de stationnement sur tout leur territoire, excepté Wavre qui ne l’a pas encore inscrite dans son règlement communal mais se montre, nous a-t-on dit, néanmoins « tolérante ».

Un cas exemplaire : la ville de Namur. C’est au Commissaire Joseph RULOT qu’incomba la tâche d’en parler : Celui-ci insista tout d’abord sur le fait que le rôle de la police est limité : elle ne fait pas les lois, elle les fait respecter (verbalisation et parfois enlèvement du véhicule). Pas encore assez, bien sûr, car elle n’en a pas toujours les moyens. Elle ne se contente donc pas de réprimer, de dénoncer un comportement impardonnable, elle essaie de convaincre la population de faire preuve de civilité élémentaire.

Pour ce qui est de la ville de Namur, de plus, l’échevinat des affaires sociales a dans ses compétences la création d’emplacements de parking après enquête dans les milieux intéressés dans le cadre de l’aménagement de la voie publique. L’orateur rappela que Namur dispose de 155 emplacements réservés pour PMR, et cela depuis la mise en place d’horodateurs en 1992.

Actuellement la surveillance de ces emplacements est mieux assurée, grâce à une augmentation du nombre d’agents. La tolérance zéro est de mise, accompagnée parfois aussi d’enlèvement du véhicule.
Par ailleurs, une collaboration avec les TEC prévoit des aménagements pour les PMR concernant les arrêts et l’accessibilité aux véhicules. Sur une intervention de Thierry Carière à propos de l’utilisation des anciennes cartes brunes par de vrais ou faux handicapés, le commissaire confirma qu’elle fait toujours l’objet d’un PV et/ou, en flagrant délit, d’une confiscation.

A charge pour son titulaire de réintroduire une demande d’obtention réglementaire. Mr Christian Baeke, chaisard et président de GAMAH (Gr. d’Action pour une Meilleure Accessibilité pour Handicapés) suggéra que devraient systématiquement être enlevés et mis en fourrière les véhicules des « inciviques », convaincu que telle mésaventure, colportée par voie de presse ou le bouche à oreille s’avérerait des plus dissuasive. Le commissaire Rulot en convînt à demi mots. A quoi Mme Marlière, représentante de l’Association Socialiste de la Personne Handicapée, répliqua que le rôle des associations pourrait aussi être de faire pression sur le législateur pour faire passer ce message, au moment où des élections se profilent à l’horizon.

4) Faisant maintenant appel à l’associatif, Thierry Carière passa précisément la parole à Madame Gisèle MARLIERE (ASPH) L’oratrice entama son intervention en insistant sur l’importance du rôle de démystification et de sensibilisation qu’ont les associations de PMR vis-à-vis des personnes valides. Il faut les rapprocher les unes des autres, car les problèmes des uns concernent également les autres. Il ne faut pas oublier que les défauts physiques s’accentuent avec l’âge et que tout le monde finit par être concerné. Madame MARLIERE cita les priorités établies par son association :
a) Se définir des principes conducteurs, une éthique ;
b) Veiller à être informé correctement ; analyser minutieusement la législation sur les PMR ; ne pas improviser !
c) Dans son rôle de sensibilisation, l’association doit susciter la participation des PMR en tenant compte de l’ensemble de leur apport, les sensibiliser sur le plan politique, c’est à dire citoyen ;
d) L’association doit jouer le rôle de relais, de représentation auprès des pouvoirs politiques, elle doit les interpeller ainsi que les médias ; elle doit être un véritable lobby, un groupe de pression ;
e) Toujours faire référence au cadre légal, car il s’agit d’une démarche de citoyenneté. L’oratrice conclut en insistant à nouveau que tous doivent être solidaires et qu’il faut éviter d’opposer les uns aux autres. Elle constate d’ailleurs que des progrès appréciables ont été accomplis à cet égard.

5) Autre initiative : celle entreprise à Louvain-la-Neuve par un groupe de travail pour l’accessibilité à l’université. Elle fut présentée par Monsieur JACQUET, médiateur urbain à LLN accompagné de Madame Van Grunderbeeck (Chaisard) qui fait partie du même groupe de travail à l'UCL. Ce groupe a, en collaboration avec la ville et avec l’association GAMAH, à son actif la réalisation d’une carte de LLN avec indication des emplacements de parking, + 140. Ceux-ci seront-ils gratuits dans les parkings souterrains ? Pas encore de réponse à cette question.

Le groupe se veut mettre l’accessibilité des Moins valides, en tête de leurs préoccupations notamment dans l’étude de la mobilité à l’intérieur du nouveau centre commercial, en construction.

6) Fut ensuite abordé brièvement le problème de l’attitude des Parquets : De la conversation entre Gisèle Marlière, Alain Etienne et Thierry Carière, il apparut que tous trois admirent que la loi n’était malheureusement pas encore assortie d’une harmonisation entre les Parquets. Il y aurait pourtant, semble-t-il (d’après le commissaire ETIENNE) un accord entre Charleroi, Mons et Tournai.

7) Le président passa ensuite la parole à un professionnel en matière d’aide aux pouvoirs publics, Monsieur John BROGNIEZ du Bureau d’étude Plain-Pied. D’après l’orateur, les travaux de ce bureau ne concernent pas seulement les PMR, ils concernent tous les types de handicap mais également tous les piétons, c’est-à-dire tout le monde, selon le principe bien connu : « qui peut le plus peut le moins ». Leurs travaux se situent, toujours en conformité avec les clauses du CWATUP (Code wallon d’aménagement du territoire), sur le plan de :
a) L’architecture extérieure et intérieure : aménagements de parcs, jardins, d’événements (francofolies, par ex.) ;
b) L’urbanisme : aménagement de parkings, d’arrêts de bus (avec les TEC), de voirie. Le but est toujours d’assurer la convivialité du parcours. Tout se fait par collaboration entre gestionnaires, usagers et professionnels.

8) Rôle des médias : En l’absence de Monsieur Renaud Tockert (journaliste et directeur de Cap 48), T.C. insista sur le rôle primordial de la presse écrite, radiophonique et télévisée par son souci de refléter les problèmes des PMR, par son poids auprès de l’opinion publique et par sa capacité d’éveil (ou de réveil) des pouvoirs publics.

9) Enfin, « last but not least », Madame Véronique GHESQUIERE nous rappela la raison d’être du « Centre pour l’Egalité des Chances », qu’elle qualifia d’ « outil complémentaire ». Son rôle fait référence à la loi « anti-discrimination », loi, qui selon l’oratrice concerne tout un chacun, mais particulièrement les « faibles » (handicapés, personnes âgées, de santé déficiente, etc.). Le champ d’application de cette loi est extrêmement large. Par exemple, l’absence d’aménagement pour un spectacle, pour l’accès à un service public, à une banque, etc. constitue une infraction. Une liste de cas de discrimination reste donc forcément ouverte. La parole fut ensuite donnée à l’assemblée qui ne manqua pas de solliciter des informations complémentaires auprès des différents participants. Certains n’avaient d’ailleurs pas attendu cet instant pour interpeller les orateurs dès la fin de leur intervention, mais toujours dans une convivialité de bon aloi.

Conclusions de Thierry Carière : Le président remercia chaleureusement tous les acteurs de cette journée très réussie. Il regretta en passant l’absence de certains responsables qui avaient été invités en bonne et due forme. Il conclut en constatant que si, dans la foulée de l’année 2003 de la Personne handicapée, beaucoup avait été réalisé, il restait encore beaucoup à faire. Tant mieux, en fin de compte, cela permettra à chacun de rester actif et vigilant et aux associations de continuer à jouer les « vilains petits cailloux dans les chaussures des décideurs »

Ainsi, puisque le rôle des associations de PMR se veut aussi de faire passer aux « décideurs de tous ordres » (forces de Police, collège des Procureurs du Roi ou législateur) leurs réflexions et suggestions lorsqu’elles sont « raisonnables et raisonnées », nous pourrions notamment leur suggérer que : Dans la foulée de la « tolérance zéro » et de la gratuité, quasi généralisée appliquées par la majorité des verbalisants, deux mesures « dissuasives » supplémentaires soient instaurées :
1- L’affichage du montant des amendes
2- L’enlèvement du véhicule (avec renfort de publicité dans la presse locale).

Et que la Tolérance zéro s’applique aussi vis à vis des abus : par ex. utilisation des anciennes cartes brunes (héritées parfois d’un parent décédé depuis longtemps) Sous le mode de l’humour, qui se veut caractéristique des messages que veulent faire passer les Moins valides, son mot de la fin rappela que : PMR voulait dire Personne à Mobilité Réduite … mais qu’elle pouvait tout aussi bien se dire d’une Personne à MENTALITE Réduite, celle-là très nettement moins « sympathique ».